La Veine de Marshall : Pourquoi intéresse-t-elle tant les rythmologues ?

Dr franck Halimi, L'alcoolisation de la veine de Marshall

On pense tout savoir de l’anatomie cardiaque. Pourtant, il y a des structures embryonnaires oubliées qui peuvent jouer un rôle dans la genèse ou l’entretien des arythmies atriales. Connaissez-vous la veine de Marshall?

Revenons à nos cours d’embryologie. Il y a à l’origine deux veines caves supérieures avec involution secondaire de la veine cave gauche. Celle-ci devient la veine de Marshall qui se jette dans le sinus coronaire. Cette veine, encore appelée ligament de Marshall, est entourée d’un fin manchon de tissu musculaire qui peut être le siège d’automatismes atriaux anormaux ou conduire le front d’activation électrique d’une macro-réentrée par voie épicardique.

Bon nombre de flutters gauches, notamment au décours d’une ablation de FA persistante, peuvent emprunter les fibres musculaires péri-veineuses du Marshall rendant impossible l’ablation par voie endocardique. Il s’agit particulièrement de flutters péri-mitraux, toujours difficiles à ablater.

Fort de l’expérience acquise dans les cardiomyopathies obstructives, il a été proposé de procéder à une alcoolisation de la veine de Marshall afin d’interrompre la conduction électrique de ce « bypass » épicardique. La technique repose sur le cathétérisme de la veine de Marshall via le sinus coronaire. À l’aide d’un guide d’angioplastie et par angiographie sélective on va localiser la veine puis gonfler un ballonnet occlusif avant d’injecter de l’alcool pur. L’éthanolisation sclérose la veine et son enveloppe musculaire mais elle crée aussi un petit infarctus atrial  du segment postérieur de l’oreillette gauche dans la région de l’isthme mitral.

L’alcoolisation de la veine de Marshall permet donc d’interrompre les flutters péri-mitraux rebelles. Plus récemment, il a été proposé d’intégrer cette alcoolisation sélective à un nouveau protocole d’ablation de la FA persistante avec des résultats prometteurs en termes de le maintien du  rythme sinusal mais aussi de préservation de la contractilité atriale.